Les retraites : la fin d’une (belle) histoire française ?
Issues de la résistance, marquées par la guerre qui avait d’une certaine manière rapprochée les groupes sociaux , ces constructions sont le fruit d’un compromis politique à la fois moderne et fragile. « Faire en sorte d’assurer au travailleur la sécurité du lendemain », selon les termes d’un des pères de la protection sociale. (Pierre Laroque. Interview dans « Le Monde », 29-30 septembre 1985.) Une contrepartie d’un effort demandé par la modernisation qui fit passer notre économie à l’ère industrielle.
La gauche sous Pierre Mauroy l’a fixé à 60 ans depuis 1983.
27 ans plus tard, dans un Sénat silencieux, il se rappelait avec émotion de vieux mineurs du Nord, lui disant leur fatigue « d’arquer après 60 ans ». Du fait de l’allongement de la durée d’études et de la montée du chômage, nombre de salariés travaillent déjà au-delà de ce seuil pour atteindre 61,5 ans en moyenne.
Cette réforme concerne donc au premier chef les salariés ayant commencé à travailler jeunes, les moins formés et très souvent des femmes qui ont connu des ruptures de carrière (maternité?).
Par ailleurs, l’âge de départ à la retraite n’équivaut pas à l’âge de cessation d’activité, qui est actuellement de 58,8 ans en moyenne. Rallonger la date de départ revient à entériner une baisse des pensions, en particulier pour les travailleurs de plus de 55 ans, concernés en première ligne par l’évincement des effectifs des entreprises, et dont environ 40% d’entre eux est sans emploi, parfois en situation de grande précarité.
Alors, réformer, oui.
En tenant vraiment compte de la pénibilité : le taux aujourd’hui pris en compte pour un départ à 60 ans ne concerne qu’une une infime partie des salariés.
Dés que la durée de cotisation est atteinte et quel que soit l’âge.
Pour les femmes, particulièrement concernées par les ruptures de carrière, à taux plein à 65 ans comme aujourd’hui.
En favorisant les départs progressifs à temps partiel.
En remettant au débat ces éléments lors d’un débat serein et sans tabou sur le financement y compris en l’élargissant davantage à l’ensemble des revenus : financiers et du capital en particulier, épargnés par le gouvernement.
Et sans le délier du débat de la politique de l’emploi : on sait que les taux d’activité, des jeunes, des femmes, des séniors, constituent des plaies qui obèrent lourdement les équilibres de nos régimes de retraite.
Alors que nous nous racontions une nouvelle et belle histoire à venir, celle d’une société qui replacerait le travail à sa juste place, le cortège ?fourni- de la CFDT s’attardait devant notre point fixe. Avec lui, s’en allaient à toute vitesse nos quelques milliers de tracts. En fin d’après-midi, en queue de cortège, beaucoup parmi ceux concernés en première ligne par la réforme lavaient à grandes eaux les traces de notre défilé.