L’ouvrier face à la taxe sur les robots

TRIBUNE
par Vincent Champain, président de l’Observatoire du Long Terme

A l’issue de la primaire de gauche, Benoît Hamon s’est distingué par un style direct et apparemment sincère, ainsi que par deux propositions phares : le revenu uni­versel et la taxation des robots. Elles peuvent sembler séduisantes. Malheureusement, le diagnostic sur la fin du salariat ne se retrouve pas dans les statistiques. Sur une décennie, la part de l’emploi non salarié a diminué de 7,6 à 6,5 % aux Etats-Unis, pourtant plus en avance que nous en matière de plates-formes numériques, et de 17,8 % à 15,8 % pour les pays de l’OCDE.

« Droit à la paresse »

En outre, l’application du modèle Uber à des relations d’emploi plus durables que le taxi, comme les emplois à domicile, s’est soldée par des échecs. Comme le contrat de mariage, le contrat de travail traduit ce que les économistes appellent des coûts de transaction : il est plus rationnel de faire un choix une bonne fois pour toutes, afin de bénéficier des avantages d’une relation stable et de confiance, que d’encourir le risque et les efforts de refaire ce choix tous les jours. Or le numérique ne réduit fortement ces coûts de transaction que dans certains cas.

Par ailleurs, s’il est utile de déconnecter notre protection sociale du salariat, c’est possible sans pour autant créer un « droit à la paresse » moralement et financièrement insoutenable. Des ­solutions comme le revenu universel d’activité, étudié par l’Observatoire du Long Terme, peuvent le permettre. On peut comprendre qu’une motion de ­congrès, ou, à la rigueur, qu’une primaire se gagne, à gauche ou à droite, sur des orientations imprécises mais séduisantes. Mais, sauf à penser que les promesses politiques n’engagent que ceux qui y croient, on est en droit d’attendre que le candidat, une fois ­désigné, investisse son capital de sympathie sur des solutions plus précises, finançables et efficaces.

Taxer les robots réduirait la richesse par habitant

La taxe sur les robots va un cran plus loin en matière d’idée séduisante mais contre-productive. L’investissement en capital permet de rendre les salariés plus productifs : équipé d’un robot ou d’une machine performante, un ouvrier pourra produire plus et compenser les écarts de coût du travail. C’est ainsi que l’on développera les fameux emplois qualifiés à valeur ajoutée. Réduire cet investissement, c’est ne laisser à l’ouvrier que sa productivité manuelle face à des centaines de millions de personnes dans le monde coûtant dix à cent fois moins cher. Et taxer l’investissement, c’est en réduire doublement les montants investis : les entreprises présentes investiront moins, et celles qui envisageaient de se développer en France choisiront des cieux plus cléments ailleurs en Europe.

Les faits confirment ces évidences, et les analyses présentées sur le site de l’Observatoire du Long Terme sont sans appel. D’abord, la France ne fait pas partie du peloton de tête en matière de robots industriels. Selon l’Inter­national Federation of Robotics, nous avions en 2015 près de 60 % de robots de moins que l’Allemagne par emploi industriel. Ensuite, les pays qui utilisent le plus de robots sont ceux qui ont la croissance la plus élevée. Enfin, cette corrélation s’accélère : elle est deux fois plus forte de 2005 à 2015 qu’elle ne l’était de 1995 à 2005. Taxer les robots accentuerait encore notre écart et réduirait mécaniquement la richesse par habitant de notre pays.

L’Observatoire du Long Terme n’a jamais eu vocation à prendre parti pour ou contre un candidat. En revanche, il a été créé pour apporter dans le débat public des éléments factuels visant à éclairer les enjeux de long terme. Or, en ce qui concerne le lien entre le coût de l’investissement, son niveau et la valeur ajoutée des emplois induits, les faits parlent d’eux-mêmes. Souhaitons que le débat permette aux candidats d’en tenir compte pour affiner leurs propositions.

Cette contribution a été publiée sur le site des Echos le 14 février 2017.
Mise à jour de la proposition de revenu universel de Benoît Hamon au 6 mars 2017.

Origine ou identités

 Le 5 octobre 2015

Tels des Hamsters pour faire tourner notre roue, nous nous voyons infligés quotidiennement notre dose de décharge électrique. Cette semaine, alors que les éructations des ‪#‎MoranoCollard faisaient descendre le concept de Nation au douzième sous-sol, dimanche, nous avons eu droit à un meeting surréaliste d’Erdogan à Strasbourg, France. Retransmis en direct sur la TV turque. A quelques jours d’élections législatives anticipées et devant 12 000 à 15 000 personnes séparées par sexe, le chef d’Etat turc a donné une démonstration de sa « modération ». La Turquie, autrefois aux portes de l’Europe, fait tirer sur sa propre population. Elle est cependant présentée par Erdogan comme défenseure de la « vraie civilisation ». Et tandis qu’il faisait huer les noms des Etats européens, le message du président turc était, selon le correspondant du Monde : « un seul drapeau, un seul pays, une seule foi ». Profitant d’une sortie sur sa population Kurde et de « ses partisans installés en Europe », il refuse « d’abandonner son pays aux vauriens », les menaçant de « faire regretter tous ceux qui veulent se détacher », rendant hommage aux « martyrs », sans nommer Daesh nous dit Le Monde. On devine l’enthousiasme qui va déferler au mois de décembre pour nos élections régionales. Quand à nos messages de « vivre ensemble » distribués sur des marchés, résonnent en écho un silence de plomb des démocrates. Tétanisés par les démagogues qui eux ne doutent de rien.

François Hollande

« Ce qui fait votre caractère, c’est cette capacité à vous élever, c’est ce qui a fait l’éclat de votre vie publique. Vous avez servi l’intérêt général, quitte parfois à sacrifier le vôtre »

François HollandeAu sujet de Michel Rocard lors de la remise des insignes de la Grand croix de la Légion d’Honneur

Le 4 octobre 2015

Etudiant et tout jeune militant écolo, j’ai rencontré Tareq Oubrou, Imam de Bordeaux, porteur d’un islam sage et libéral. Cette discussion m’a profondément marqué d’autant qu’elle faisait écho à mon expérience de jeunesse où avec mes camarades d’usine musulmans, nous étions « pareils » et surtout « ensemble ». Face aux enfants de bourgeois, d’une certaine manière. Sans avoir les mêmes armes à l’école notamment. Ceux-là même qui, trente ans plus tard, inondent les médias. Ceux qui pensent qu’on peut résoudre la question sociale et les peurs de déclassement par le déni ou des discours « respectueux » des dogmes. Ceux qui masquent leur fourberie et réservent les meilleures places à leur progéniture. En se défaussant à bon marché, bradant liberté de conscience, principes d’égalité et de fraternité sur l’autel de leurs petites culpabilités de rentiers. Ils instrumentalisent ceux qui, à leurs yeux, représentent les « nouveaux pauvres », assimilés à une religion minoritaire, infantilisent ceux qui font la plonge dans les restos qu’ils fréquentent, méprisent leurs attentes profondes, les réduisent systématiquement à l’état d’êtres incultes et immatures. En revêtissant les habits des idiots utiles qui vendent à bas prix de la chair à canon aux prédicateurs.

Un Compte Personnel d’Activité Universel et Autonome

Lors d’un entretien avec la presse, le président François Hollande a annoncé la création d’un Compte Personnel d’Activité (CPA) pour l’ensemble des français. Après le temps de la communication politique, ce fut ensuite le temps de la procédure législative. Adopté dans le cadre de la loi de modernisation du dialogue social, nous en savons davantage sur les contours de ce nouvel outil au service de la sécurisation des parcours professionnels. Alors qu’il n’a pas fait l’objet d’une concertation avec les partenaires sociaux, il revient à ces derniers la responsabilité de donner à vie au CPA qui devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2017. Il s’agira de regrouper des droits qui accompagneront les salariés tout au long de leur parcours professionnel.

Novo Ideo fait partie des think tanks consultés par Jean Pisany-Ferry, Commissaire général de France Stratégie, en charge pour le Premier Ministre de proposer les options envisageables pour la mise en place du compte personnel d’activité (CPA), dispositif inscrit à l’article 21 du projet de loi « relatif au dialogue social et à l’emploi ». Voici sa contribution sous la forme d’une « note de proposition », la première du genre de notre think tank.

Pôle social-relations sociales : Christophe Rieuze.

Un Compte Personnel d’Activité Universel et Autonome. Nos propositions.

« Génération Thévenoud : la domination des apparatchiks »

1er volet du dossier «Apparatchiks et élus professionnels: une génération Thévenoud?»

Préambule : Pourquoi s’intéresser aux moins de 40 ans ?

Le premier volet de ce dossier est consacré aux députés élus en 2012 à moins de 40 ans. Il est en effet éclairant de comprendre le profil et les origines de la nouvelle génération, afin de renseigner la dynamique de remplacement des précédentes cohortes.

Ce groupe est constitué à 86% de primo-élus (1)au sens de la première élection à l’Assemblée nationale : seuls 9 députés sur les 61 qui le composent siégeaient déjà sous la XIIIème législature. Méthodologiquement, il est le groupe pour lequel la compréhension de l’origine professionnelle de ses membres est la plus aisée. Telles que conçues par la HATVP, les DIA (questions 1 et 2) interrogent en effet le parcours professionnel des élus sur la période de 5 ans précédant l’élection de juin 2012, mais pas au-delà. De telle sorte que l’on ne peut renseigner avec la même précision les activités professionnelles des députés élus sous les précédentes législatures.

Enfin, le poids de ce groupe dans la XIVème législature a progressé sensiblement par rapport à 2007-2012 : en 2007, seuls 4,5% des députés avaient moins de 40 ans au moment de leur élection, contre 10,5% en 2012. Il est donc intéressant de rechercher si un processus particulier est à l’œuvre. En soi, le rajeunissement de l’Assemblée nationale est réjouissant. Reste à déterminer si l’analyse des faits confirme cet a priori.

1 .Une forte progression de la part des députés élus à moins de 40 ans

D’une législature à l’autre, le nombre de députés âgés de moins de 40 ans au moment de leur entrée à l’Assemblée est passé de 25 à 61 (2)http://www.assemblee-nationale.fr/qui/xml/age.asp?legislature=14 (âges actualisés à la date de consultation de la page).

Stables chez les centristes (2), les effectifs augmentent du côté d’EELV (de 1 à 3), qui profite de la croissance globale de son groupe (de 3 à 18 députés). Les mouvements les plus significatifs se trouvent toutefois du côté de l’UMP et du PS.

La progression la plus remarquable concerne l’UMP, qui compte désormais 15 députés élus à moins de 40 ans, contre 13 précédemment. Cette croissance, numériquement peu significative, l’est beaucoup plus en termes relatifs. Les jeunes députés UMP représentent désormais 8% de leur groupe parlementaire (15/197) (3)http://www.assemblee-nationale.fr/14/tribun/xml/effectifs_groupes.asp , contre 4,5% précédemment (13/304). Cette évolution est contre-intuitive au moment où le groupe a perdu plus de 100 députés. Dans un contexte de défaite électorale, l’ancienneté de l’implantation politique amortit généralement, dans une certaine mesure, les mouvements induits par la dynamique nationale : on aurait donc pu s’attendre à ce que le nombre et la proportion de jeunes élus diminuent pour le groupe d’opposition. Il est donc probable qu’un phénomène particulier a joué pour arriver à ce résultat (cf. infra).

En ce qui concerne le PS (groupe socialiste, républicain et citoyen), on relève une croissance substantielle des effectifs constitués par les députés élus à moins de 40 ans. Portés notamment par le contexte national favorable, ils sont désormais 38, contre 9 sous la précédente législature, soit 13% de leur groupe (38/290) contre 4,5% précédemment (9/195). Cette progression significative autorise à s’intéresser au profil des nouveaux arrivants et à tenter d’y déceler des tendances.

2. Une nette majorité de députés n’ayant pas connu l’expérience de la vie professionnelle

Plus de la moitié des jeunes députés PS ne peuvent se prévaloir de connaître réellement la vie professionnelle

L’enseignement principal de la lecture des DIA des 38 députés du groupe SRC élus à moins de 40 ans est leur distance au monde du travail.

Antérieurement à leur entrée à l’Assemblée nationale, 23 d’entre eux (soit 61%) ne font état d’aucune activité professionnelle autre que des fonctions d’assistant parlementaire, de collaborateur d’élu local ou d’élu au scrutin de liste.

61%

des jeunes députés PS n’ont exercé aucune activité professionnelle

Ces profils seront désignés par la suite comme « apparatchiks »(4)ce terme désigne des personnes sans expérience professionnelle propulsés par leur parti ; mais à la différence des anciennes républiques socialistes, ils ne sont pas vraiment soumis au contrôle du parti qui les a promus, ce qui autorise, l’élection passée, la mise en place de stratégies personnelles.  . Ils seront distingués des « élus locaux professionnels », qui partagent avec les premiers le fait de ne pas être insérés dans le monde du travail, mais qui ont déjà été élus au scrutin uninominal. Elus sur leur nom, ils ne sont pas à ce titre totalement tributaires pour leur avenir d’une décision de leur parti, ce qui les différencie des apparatchiks.

Pour la quasi-totalité de ces 23 députés, les trois dimensions de la construction de la carrière (collaborateur d’élu local, élection au scrutin de liste, assistant d’un élu national) sont tellement intriquées qu’il est difficile d’établir des statistiques séparées sur ces grandes filières. Quasiment tous l’ont été successivement, voire cumulativement.

On peut néanmoins esquisser quelques grands schémas de déroulés de carrière, sur le modèle de l’exercice pratiqué par la députée et ancienne ministre Michèle Delaunay sur son blog (pour des résultats assez proches).

 Blog de Michèle Delaunay: "Le tunnel ou comment faire carrière sans mettre un pied dans la vraie vie"

« Ils ont fait sciences- po, passé ou non un concours de l’administration, regardé autour d’eux… Et finalement trouvé un poste d’attaché parlementaire ou un job dans une collectivité et, pour les plus chanceux ou les plus habiles, dans un « Cabinet ».

Blog de Michèle Delaunay: "Le tunnel ou comment faire carrière sans mettre un pied dans la vraie vie"députée (PS)
  • l’affaire dite « Thévenoud » a contribué à médiatiser l’un d’eux : exercer les fonctions de directeur de cabinet (ou de simple collaborateur) d’une structure intercommunale tout en étant conseiller municipal de la ville centre, en devenir le vice-président lors du mandat suivant, et cumuler par ailleurs un autre mandat local (en l’espèce celui de conseiller général) (5)tout en étant « chargé de formation à la direction générale d’ERDF »;
  • le deuxième schéma consiste en un type particulier de cumul, entre l’exercice de mandats électifs (adjoint au maire et vice-président de la structure intercommunale par exemple) et des missions de collaborateurs (d’élus d’autres collectivités ou de parlementaires) ;
  • le troisième schéma débute par des fonctions au sein d’organismes proches du PS (mutuelles et syndicats étudiants, organisations anti-racistes par exemple) avant de se poursuivre auprès d’élus d’envergure nationale, que ce soit au parlement ou, si la conjoncture nationale s’y prête, en cabinet ministériel.

Au total, l’analyse des parcours de ces 23 députés fait ressortir 6  élus locaux professionnels et 17 apparatchiks.

  • Un constat identique peut être dressé à l’UMP

Les députés UMP élus en 2012 à moins de 40 ans sont certes moins nombreux que leurs homologues du groupe SRC, mais ils sont également une majorité (9 sur 15) à ne pas avoir connu l’expérience de la vie professionnelle.

La taille de cet échantillon est insuffisante pour déduire de sa composition des hypothèses fiables. En revanche, la comparaison des 2 groupes complets (SRC et UMP) est susceptible de fournir un certain nombre d’enseignements.

3. PS et UMP : deux moteurs bien distincts dans la promotion des jeunes députés

La comparaison à l’échelle des groupes laisse entrevoir les stratégies déployées par les deux principaux partis français pour promouvoir leurs jeunes éléments. Alors que le PS a clairement tiré profit des ressources que lui a assuré la conquête des collectivités locales de 2004 à 2014, l’UMP s’est au contraire appuyée sur la détention et l’exercice du pouvoir d’Etat pour faciliter et accélérer la trajectoire de ses jeunes membres.

L’influence qu’ont pu avoir les parcours en collectivités locales pour les 23 députés PS de profil « apparatchiks » a été détaillée précédemment. L’étude des profils des autres députés de moins de 40 ans du groupe SRC tend à confirmer l’importance des collectivités locales.

Il est en effet notable que parmi ces 15 autres députés, le profil le plus répandu (4 députés, devant les enseignants ou chargés d’enseignement) corresponde à des cadres A de la fonction publique territoriale exerçant un mandat local en parallèle de leurs missions de fonctionnaire.

La présence dans ce groupe d’un seul fonctionnaire d’Etat (6)hors éducation nationale et l’absence de représentant des grands corps tendent à accréditer l’importance relative que revêt désormais le personnel (élus, fonctionnaires) des collectivités locales pour le PS.

A contrario la composition du groupe UMP relève quasiment du miroir inversé. Parmi les 15 députés élus à moins de 40 ans, c’est le profil des énarques sortis dans les grands corps qui est le plus répandu. L’on ne recense en revanche qu’un seul élu local professionnel, contre 3 assistants parlementaires et 2 éléments directement promus par le parti, que ce soit par l’investiture à des scrutins de liste (élections européennes en 2009 puis élections régionales en 2010) ou par la succession de fonctions au sein de cabinets ministériels.

On peut donc supposer que l’exercice du pouvoir au niveau national permet de « blanchir » un certain nombre de jeunes recrues : après un parcours au sein de l’appareil d’Etat, ils se voient investis par leur parti aux élections législatives et y reçoivent l’onction du suffrage universel, qu’ils considèrent pour la suite de leur carrière comme le sésame susceptible de faire oublier leur inexpérience du monde du travail.

Le PS, quant à lui, a été privé de telles perspectives entre 2002 et 2012. Mais il a su mobiliser l’extraordinaire levier qu’a constitué la maîtrise de la majorité des collectivités locales de 2004 à 2014. Ce levier lui a permis d’une part de confronter de jeunes éléments à la conduite des affaires publiques et d’autre part de se constituer un vivier de recrutement non négligeable.

Avec la reconquête d’une majorité des villes de plus de 10 000 habitants par l’UMP en mars 2014 et le vraisemblable basculement des départements et régions en 2015, les élections nationales de 2017 permettront de tester la robustesse de ce modèle : face à combien de jeunes socialistes formés par l’exercice du pouvoir se présenteront ces jeunes élus locaux UMP ? PS et UMP joueront-ils à front renversé en 2017 ? S’il se confirmait, ce modèle tendrait à mettre en lumière une forme d’immuabilité dans la sélection du personnel politique, au-delà des résultats produits en apparence par les différentes alternances.

4. Une nette sous représentation des députés issus du secteur marchand

S’il est en revanche une dimension où les deux grands partis du système politique français se rejoignent sans ambigüité, c’est sur la nette sous-représentation des jeunes députés issus du secteur marchand : seulement 2 pour chacun. En ce qui concerne le groupe SRC, il est notable que ses 2 représentantes – Karine Berger et Valérie Rabault – figurent parmi les parlementaires les plus actives dans le débat engagé avec le gouvernement sur la politique économique, sans pour autant se ranger du côté des « frondeurs ».

 

Propositions

1. Pour une « Loi de respiration de la vie politique »

2. Impossibilité de cumuler dans le temps plus de deux mandats successifs

3. Création d’un statut de l’élu intégrant un fonds d’indemnisation et de reconversion

4. Accès des élus au système de Valorisation des Acquis de l’Expérience (VAE)

Notes   [ + ]

Après le Printemps de l’éolien offshore…

Pourtant, l’attribution récente au groupe GDF du second appel d’offres d’un volume de 1000 MW devrait accélérer la sortie des fonds des eaux d’une filière industrielle encore émergente.

La France devra en effet redoubler d’effort afin d’atteindre d’ici 2020 75 % de la capacité actuelle de l’éolien terrestre, soit 6000 MW ou l’équivalent de quatre gros réacteurs nucléaires. Pas moins de 10 000 emplois à créer selon Madame Royal et près de 4 millions de tonnes de CO2 à économiser chaque année.

Plus couteux que son cousin terrestre, mais plus productif, car il dépend d’une météorologie plus prévisible, l’éolien marin n’est pas encore arrivé à son stade de maturité. Il recèle d’ores et déjà un fort potentiel de développement pour les territoires.

L’activité économique locale induite est en effet significative. Pour le précédent appel d’offres de cette importance remporté en 2012 par le concurrent EDF, la valeur ajoutée estimée était au trois quarts nationale et régionale. Dans ce cas de figure, la « Compagnie du vent » quantifiait à près de 2800 le nombre d’emplois créés pour les phases d’ingénierie, de fabrication et de pose.

Pour les collectivités en crise, ce secteur est également une opportunité touristique déjà expérimentée avec succès par nos voisins britanniques et danois. D’autant que sur le plan de l’environnement, « l’effet récif artificiel » constitué par les mâts participe au développement de la ressource halieutique.

Dans un premier temps bloqué par la présence possible de mines, le projet continue de susciter des points de friction en matière de conflits d’usage, particulièrement sensibles. La population des pêcheurs est touchée par la hausse tendancielle des carburants. Une frange s’obstine à vouloir revenir vers une pêche sans avenir, affranchie de tous quotas. Elle appelle cependant une vigilance particulière. La taxe spécifique aux éoliennes en mer devrait représenter à terme un produit de plusieurs dizaines de millions d’euros. Un levier pour une conversion sociale réussie.

C’est là un résumé saisissant des risques entre lesquels la future Loi sur la transition énergétique présentée d’ici cet été devra naviguer. Là où la filière nucléaire a fait l’objet en son temps d’un soutien massif en fonds propres et d’une nouvelle promesse industrielle, le développement de l’éolien devra surtout compter sur les tarifs de rachat et l’obligation d’une reconversion des filières du passé.

D’autant que le gouvernement est également confronté à la concurrence des carnets de commandes, notamment. Ceux des acteurs de l’industrie navale ou des équipementiers électriques. Rien que sur le créneau des énergies renouvelables marines, la valorisation électrique des courants ou les potentialités soulevées par l’éolien posé à grande profondeur, les modèles économiques sollicités s’accommodent peu des taux de retours exigés par les marchés pour ce type de projet.

Réussir « l’Été de la transition énergétique » appellera donc une responsabilité forte des pouvoirs publics dont la maitrise d’ouvrage devrait permettre de desserrer l’étau de la rentabilité des futures réalisations industrielles. Mais ils devront également faire preuve d’innovation si on ne souhaite pas que cela se traduise par un nouveau coup de chaud pour nos finances publiques.

Un article publié sur le site du quotidien Les Echos le 29 mai 2014.