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Repenser le financement de nos collectivités territoriales

Peut-on affranchir les collectivités du nécessaire effort de redressement des comptes publics ?

UNE AUSTERITE CONTRE LES DEPENSES D’AVENIR ?

Le voudrait-on seulement que les difficultés de financement sur plus de 200 milliards de budgets locaux s’imposeraient avec davantage de force que ces dernières années. Avec la reprise du dogme de la stabilité de la dépense publique, le Premier Ministre a donné le « la » : le gel de près de 20% du budget de l’Etat constitué de dotations et autres concours aux territoires est confirmé. Le récent éclairage du rapport de la Cour des Comptes ([Rapport du 2 Juillet 2012)] vient en appui de cette décision. Selon ce document, le remède d’une rigueur durable fondé sur la réduction de la dépense devrait s’appliquer au monde local avec plus d’attention.

Dans la prochaine Loi de Finances, les transferts financiers de l’Etat vers les collectivités n’augmenteront donc pas. Ce qui est déjà une forme de régime de faveur compte tenu des baisses de crédits que nombre de Ministères devront supporter pour financer les priorités nationales actuelles : Education nationale, Justice. Le retour à un déficit zéro revient pourtant à faire peser sur les équilibres existants une part du financement du coût de la dette ancienne au delà même d’un objectif de désendettement. La pression est donc rude.

Pour les collectivités, cet équilibre recherché se traduira par une tension croissante sur leurs ressources d’origine étatiques. Le monde local a déjà réagi au pic de la crise en calant la progression des charges de personnel sur une évolution proche de l’inflation. A l’aube de la préparation budgétaire pour 2013, la tentation est grande pour qu’une potion administrée sans distinction aux finances publiques ne franchisse un cran. Dans ce contexte, un repli brutal de l’investissement public dont les trois quarts sont portés par les collectivités n’est désormais plus à écarter.

Réussir la quadrature du cercle, c’est tout à la fois répondre à la contrainte de restauration des finances publiques sans tuer dans l’?uf les interventions d’avenir. Cela revient à passer un nouveau contrat entre l’Etat et les territoires, à refonder une relation trop souvent marquée par un retour sur la parole donnée. A la stabilité des concours de l’Etat doivent répondre en écho aux débats sur l’Acte III de la Décentralisation des objectifs de lisibilité d’un nouveau partage des compétences. En refiscalisant une partie des ressources locales, l’Etat pourrait donner une nouvelle dimension au principe de notre organisation territorialisée désormais consacré par la Constitution. En donnant une issue aux besoins de financements des territoires, il consolide un levier de sortie de crise.

Dans ce domaine, la période que nous vivons doit être propice à l’innovation. Après la création d’un banque publique sous l’égide de la Banque Postale, la mobilisation de l’épargne locale par la création d’un livret territorial, le lancement d’émissions obligataires groupées des collectivités sont autant de pistes de renouvellement d’un modèle de financement à bout de souffle. Trop souvent pensé par et pour les partisans d’un Etat Jacobin, centralisé, il peine à s’adapter à la nouvelle donne imposée par la crise financière.

Hénin-Beaumont : sortir d’un naufrage territorial

LES TEMPS HEUREUX DU PATERNALISME MINIER

Sur cette terre du Guesdisme, un temps séduite par « le populisme Boulanger », la société s’est structurée durant trois siècles autour d’une mono industrie. Elle a permis l’émergence d’une véritable aristocratie ouvrière, produit des grandes solidarités et mise à l’épreuve des vagues successives de migrations. Une société du respect, du travail et de l’humilité. Une société qui par son labeur a contribué de façon décisive au développement et à l’industrialisation de la France.

C’était le temps d’une société encadrée où tout appartenait aux Houillères. Maison, services de soins, loisirs : le giron du paternalisme minier embrasse jusqu’à la vie privée des familles et écarte de la « propagande » des bistrots. Le lundi, le garde des mines mettait à l’amende directement sur leur salaire ceux qui, le samedi précédent, n’avaient pas balayé leur trottoir. Ici, l’initiative individuelle était mal vue et le déterminisme social jouait à plein.

C’est encore le pays des pollutions, des affaissements miniers, des inversions de cours d’eau, de la silicose et de la hausse des maladies professionnelles, deux fois plus forte que dans le reste du territoire.

CORRUPTION=PAUVRETE

La fédération PS du Pas-de-Calais est issue de ces influences. Elle en tire sa forte culture égalitaire et une laïcité chevillée à l’identité ouvrière. Un socialisme républicain de la première gauche, dirigiste, qui sape l’influence du parti communiste, avec ses seigneurs locaux et leurs féodalités électorales. Sur ce bassin minier, le long d’une bande de 120 kilomètres de long sur 10 kilomètres de large, la décision de mettre fin, dès le début du premier septennat de François Mitterrand, à plus d’un siècle d’exploitation minière, sans s’inscrire dans une perspective de transformation économique et culturelle, a saisi 1,1 million d’habitants entre Valenciennes et Béthune où le taux de chômage, qui dépasse les 14%, est un des plus élevés de France. Dans la même période, Pierre Mauroy lançait le projet structurant d’Euralilles et, plus tard, Martine Aubry faisait de Lille, une capitale européenne de la culture et une notable exception.

Avec la fin de la mine, les systèmes traditionnels d’entraide et de solidarités se sont progressivement déliés, en laissant dans le désoeuvrement beaucoup d’individus parmi des populations globalement plus pauvres et plus fragiles qu’ailleurs. Ici s’observe et se mesure aussi l’épuisement de la dynamique de changement collectif, responsabilité historique des partis ouvriers.

A Hénin, le FN poursuit sa longue et patiente progression : 17,48% au premier tour des élection municipales de 2001, 30% à celle de 2008 et 48% au second tour des municipales de 2010. Entre ces élections, la Chambre régionale des Comptes constate un déficit de 12,4 millions d’euros et impose une hausse des impôts locaux de « +85% » dont le maire de Hénin-Beaumont tirera son surnom.
Le témoignage de Gérard Dalogeville, ancien Maire de Hénin-Beaumont, auteur de « Rose Mafia », éditions Jacob-Duvernet.

La nouvelle présidente du FN affûte ses armes. Elle entend faire de la conquête de Hénin la première marche de son ambition nationale. D’autres villes sont prêtes à basculer pour les mêmes mauvaises conjonctions : sociales, économiques, écologiques et morales. La droite locale se prête à évoquer à demi mot l’évolution « à l’italienne » du parti de l’extrême droite. Le projet mégrétiste rendu possible par l’héritière du parti de Le Pen : tout devient possible.

Les terrils de Loos-en-Gohelle ? Olibac

UN SURSAUT ECOLO NOMME JEAN FRANCOIS CARON

Alors, pour mettre un terme à la stratégie de Marine Le Pen, il reste le sursaut. Celui qui vient du projet initié par le Maire écologiste voisin de Loos-en-Gohelle, Jean François Caron, d’inscrire le bassin minier au patrimoine mondial de l’humanité, nous semble ouvrir de réelles pistes pour sortir d’une logique mortifère. On ne peut que regretter que le président Sarkozy ait choisi de retarder d’un an la présentation du dossier auprès de l’Unesco.

Après l’arrivée du Musée du Louvre à Lens, l’élaboration d’un projet de territoire autour de la reconnaissance de l’histoire minière suscite l’admiration autant que l’agacement d’une grande partie des élus locaux. Après l’arrêt de l’exploitation de la mine, l’Etat, les Houillères et une bonne partie du PS local n’avaient qu’une ambition : raser tout signal minier, pour être « comme les autres ». La mise à l’honneur des terrils les plus hauts d’Europe, la célébration de l’urbanisme minier, avec ces cités jardins au c?ur des villes, l’adhésion en nombre des habitants au projet, tous ces éléments montrent la révolution culturelle en cours qui ouvre enfin la porte de l’après charbon et permet d’imaginer une nouvelle dynamique fondée sur l’économie locale et l’accompagnement social. (Début 2011, se tenait localement en présence notamment de Michel Rocard une rencontre intitulée « Loos-en-Gohelle, ville pilote du développement durable. La durabilité à l’épreuve du concret ». Relatant l’expérience de ce territoire, elle connût un vif succès et une reconnaissance internationale.)

Mais plus encore, ce sont 15 années de mise en ?uvre du développement durable appliqué au réel, à Loos-en-Gohelle, qui interpelle aujourd’hui les élus, les universitaires et les journalistes. Après Bedzed et Freibourg, Loos pourrait avoir découvert un modèle de développement durable exemplaire.

Ainsi, des centaines de bénévoles s’investissent dans l’organisation des manifestations sportives, notamment le marathon qui relie Lille au site du Louvre, à Lens, que court le maire de Loos, qui en est aussi l’inspirateur. En soutien à la candidature à l’Unesco, l’arrivée cette année sera au pied des terrils, sur le désormais mythique 11/19.

L’engagement, le bénévolat, l’implication de toutes et tous est une réalité : cela va des comptages d’hirondelles par des volontaires pour mesurer le retour de la biodiversité en ville, à un nombre impressionnant de réunions publiques pour associer les habitants aux décisions sur les sujets qui les concernent. Cette alchimie faite d’ingénierie sociale et d’innovation produit un fort degré de compréhension collective et d’usage des aménagements de la commune.

L’innovation dans le développement durable est marquée par le lancement des premières maisons HQE dès 1995 pour les anciens mineurs.
Aujourd’hui, les bailleurs sociaux expérimentent le HQE Très social, en proposant des logements collectifs aux performances énergétiques bien supérieures aux normes actuelles, à environ 400 euros par mois pour un F4.

Mais les initiatives de la ville concernent d’autres domaines. La création de 15 kilomètres de ceinture verte qui entoure la commune pour stopper l’étalement urbain. Un aménagement qui facilite les continuités biologiques dans la ville, relie les écoles avec des modes de transport doux en sites propres et, accessoirement, sert de piste d’entraînement pour les coureurs à pieds.

L’ensemble de ces initiatives, de ces transformations sociales et culturelles, joue aussi sur la tranquillité de Loos-en-Gohelle, où les incivilités sont en baisse, parce que les gens se parlent et sont fiers de la reconquête d’une identité. Celle qui a été flouée par trop d’acteurs locaux qui, à force de renoncements et de petites trahisons, ont préparé les conditions d’une victoire du FN, encore impossible il y a une décennie.

Le maire, Jean François Caron, a été réélu en 2008 avec 82% des voix aux dernières élections municipales.

Cet article du think tank Novo Ideo a été publié et lu environ 4000 fois sur le site des Echos.fr

La France oubliée des périphéries

CRISE URBAINE ET PERI URBAINE

4O milliards engloutis par le Plan de Rénovation Urbaine (PRU) avec des résultats jugés « incertains » par la Cour des Comptes tandis que dans une enquête rare sur « une jeunesse rurale », Nicolas Renahy (Nicolas Renahy, Les Gars du coin. Enquête sur une jeunesse rurale Paris, La Découverte, 2006, 285 p. (« Enquêtes de terrain »))] passait dix ans sur les [destins brisés d’enfants de la classe ouvrière du Dijonnais. L’école, facteur de changement ? On le sait depuis Bourdieu, elle reproduit les inégalités et, vérité croissante, seuls les enfants des « héritiers » et des cadres trouvent leur place dans l’ascenseur social. Dans un relatif silence médiatique.

"Fractures françaises" de Christophe Guilluy par Bonzou

Depuis le « Paris et le désert français », comment mesure-t-on l’inégalité territoriale exactement ? Les indicateurs peuvent être économiques (taux d’emploi, du PIB, écarts de revenus), relatifs à la position des territoires par rapport à certaines fonctions urbaines (culture, services publics?), à l’inégalité devant les conditions sanitaires (taux de mortalité, alcoolisme?).

La lutte efficace contre ce mal français actionne la diversité des politiques publiques, confrontée à la crise de la pénurie des ressources, à l’épreuve de leur « révision générale » (RGPP). Elle passe traditionnellement par les moteurs classiques de la redistribution sans qu’elle soit inspirée par un fondement spatial explicite.

Après les émeutes de 2005, le sociologue Gilles Kepel pointe dans son rapport (Lire un dossier spécial à venir sur Novo Ideo.)] Ils satisfont à leur mission d’allocation et sont contraints de se recentrer sur cette mission principale.

Les territoires sont confrontés aux limites de leurs compétences qui s’ajoutent aux inconvénients de la rareté budgétaire. Cependant, la remise en cause de leurs interventions classiques témoigne de leurs difficultés à s’adapter également aux enjeux révélés par les sciences sociales.

La recherche récente dans ce domaine([Le Ghetto français, enquête sur le séparatisme social, La République des idées, 2004)] pointe par exemple l’échec des politiques fondées sur le « zonage ». L’inflexion des politiques publiques que préconise le sociologue Eric Maurin vise à contrecarrer les effets des stratégies « d’évitement spatial », dans le domaine scolaire notamment, par un recours accru à des aides individualisées (tutorat, création d’un service public à la recherche de logement). Ces nouveaux creusets de la science sociale expliquent ainsi comment il est vain d’alimenter la politique de la Ville, et plus encore de la réorienter sur des fondements identitaires sans tenir compte des stratégies résidentielles des ménages.

Dans la même veine, [Gosta Esping Andersen (G?sta Esping-Andersen, Trois leçons sur l’État-providence, La République des idées / Seuil, 2008) étudie les effets positifs sur les revenus dans les pays nordiques suite à la mise en ?uvre d’un service public de la petite enfance. Au delà de l’impact favorable sur la situation des enfants et tout particulièrement ceux issus de milieux populaires, ces politiques ont permis d’augmenter le taux d’emploi des femmes tout en constituant de nouveaux viviers d’emplois dans le domaine des services à la personne.

Ce faisant, ces acquis de la recherche en sciences sociales plaident en faveur d’un décloisonnement des stratégies des acteurs puisque dans le domaine cité, le soutien en faveur de la politique de la petite enfance, son prolongement renforcé dans les premières années de scolarisation ont des répercussions sur le développement des capacités cognitives des plus jeunes mais également sur les capacités pour leur(s) parent(s) à trouver un emploi voire d’amélioration du taux de remplacement de leurs retraites.

Il reste que la somme des politiques locales ne peut compenser le déficit d’intervention des Etats critiqués dans leur fonction de redistribution ou de l’Europe à l’épreuve de la crise des dettes souveraines. Selon Christophe Guiluy, cette situation appelle un « éclatement de la bulle consensuelle » sur la question du protectionnisme européen par exemple. Et à défaut, de faire des choix.

« Budgets locaux : sortir de l’impasse bancaire »

Cercle les echos

Cette situation est aussi grave que concrète. Au moment du vote de leurs budgets, les collectivités, départements et communes en tête, ont déjà dû revoir à la baisse leurs ambitions. Prenant acte de la suppression pure et simple des marges de manœuvre fiscales de leur co-financeur principal, la région, elles sont en quête du nouveau Graal : le financement bancaire. En ce début d’année, 36 000 bouts de territoires se sont mis à sa recherche, faisant valoir leurs meilleurs atouts auprès de banquiers aussi courtisés que bousculés.

COLLECTIVITÉS LOCALES ET EMPLOI

Or, loin d’être un caprice d’élus, ces financements sont indispensables à l’effort d’équipement des collectivités dont bénéficie l’activité de milliers d’associations et d’entreprises. Les territoires financent plus de deux tiers des investissements nationaux et 40% de l’activité du BTP. Avec cet assèchement en vue, c’est l’ensemble de l’investissement public qui se trouve amputé, les opportunités de créations d’emplois s’évaporent et avec elles, les capacités de l’économie française de rebondir.
Il serait possible de disserter longuement sur les causes de cette crise du crédit. A la faillite de Dexia , principal finançeur des collectivités, s’ajoute l’insuffisance des fonds mis à disposition par l’Etat via la Caisse des dépôts et leur coût. De plus, en prévision de la mise en ?uvre des normes de Bâle III , c’est l’ensemble du secteur bancaire qui réduit son activité durablement pour nettoyer les bilans des turpitudes passées.

Du côté de l’Etat, le procès sur sa responsabilité fiscale dans les déséquilibres de ses propres budgets n’est plus à faire. Le mouvement enregistré depuis 2007 de remplacement massif de recettes courantes par de la dette se répercute aujourd’hui dans les siphonages brutaux des crédits attribués aux collectivités. Les projets qui devraient voir le jour telle que la mise en place d’une banque du secteur local opérationnelle en 2013, ne suffiront probablement pas à répondre aux besoins de financement des collectivités des prochains mois.

CONTRADICTIONS DE L’ETAT

Le Gouvernement est face à ses contradictions. Confronté à l’évidence de l’utilité des investissements locaux, et sa volonté idéologique, plus forte, de voir les collectivités renoncer à certaines dépenses, il cherche le coupable idéal. Le Président de la Commission des Finances (UMP) de l’Assemblée n’a-t-il pas demandé à juste titre qu’on laisse tranquilles les territoires et leur cadre budgétaire qui les oblige à l’équilibre de leurs comptes ?

Pour sortir de l’impasse politique et financière, les collectivités peuvent attendre d’hypothétiques lendemains qui chantent.

La crise des finances publiques mettra pourtant l’ensemble des acteurs de la dépense à l’épreuve. Elle n’épargnera pas le mille-feuille territorial dont le pacte avec les autres acteurs publics est si friable et l’influence aussi balkanisée. Le phénomène de sortie des banques des financements locaux est de ce point de vue une contrainte supplémentaire pour notre organisation territoriale. Elle doit être envisagée dans le temps. L’ère bancaire n’est pas achevée mais celle des financements longs, calés sur la durée de vie des écoles et des trains fera peut-être bientôt son entrée dans le livre de l’Histoire de la décentralisation. Cela peut être à brève échéance un coup d’arrêt net à tout effort d’équipement.

UNE CRISE : UNE OPPORTUNITE POUR LES TERRITOIRES

Cela peut également constituer une opportunité. Les collectivités peuvent anticiper un nouvel Acte des finances locales en se regroupant pour mobiliser directement l’épargne locale disponible pour les financements des territoires. L’emprunt groupé est un geste qui dépasse la seule dimension financière car il touche à l’organisation même de notre démocratie et à son fonctionnement. Il faut en finir une fois pour toutes avec les conclaves et autres « ;conférences métropolitaines »; qui ne peuvent avoir les moyens de décliner les belles visions stratégiques à l’échelle des bassins de vie. Il est dans ce domaine encore temps de réduire le hiatus entre celui qui décide et celui qui finance. Tirons sur notre organisation territoriale toutes les conséquences des réalités imposées par les politiques publiques. A l’instar de la prise de position courageuse de Claude Bartolone, Président du Conseil Général de Seine-Saint-Denis, nous devons prendre appui de la fusion de Paris et de la petite couronne pour initier un vaste mouvement de simplification territoriale dans tout le pays et reconstituer un canal unique entre la décision politique et les sources de financement.

Remettre en situation de rapport de force celui qui décide avec celui qui finance suppose d’en finir avec les bricolages institutionnels et les perfusions accordées en catastrophe. Unies, les collectivités seront plus fortes et plus solidaires. Ainsi, jouer la solidarité territoriale et les économies d’échelle, c’est faire le pari de l’efficacité des politiques de solidarité et d’aménagement menacées par la dispersion et l’assèchement des liquidités ; c’est avoir le courage de s’affranchir davantage du Diktat des marchés ; c’est enfin redonner un souffle nouveau à notre décentralisation.

Demain, en innervant le cœur local de la République, les territoires refondés peuvent faire le choix de prendre ensemble leur avenir en main.

 

Propositions

La crise financière : nouvelle opportunité pour remettre en question notre organisation territoriale

Aller vers l’égalité « un territoire = un financeur » en fédérant les collectivités pour collecter l’épargne

Légitimer les nouvelles entités territoriales par une élection au premier degré

 

Budget : des territoires dans la tourmente

En 2011, le chômage a augmenté de + de 5.5%. Les fermetures de sites industriels ont ainsi été particulièrement nombreuses (200 pour la seule année 2011) occasionnant la perte de près de 100 000 emplois dans ce secteur depuis trois ans. Sur un an, les « Seniors » sont les plus touchés par cette aggravation générale avec une hausse de +15.3% des inscriptions à Pôle Emploi devant les chômeurs de longue durée. Côté dépenses, les territoires ont donc été soumis à rude épreuve : l’action sociale des communes et des départements notamment.

Côté recettes, ce n’est guère plus brillant. En 2012, le Projet de Loi de Finance (PLF) s’inscrivait ainsi dans « la stratégie de redressement des finances publiques ». De quoi s’agit-il exactement ? Le Gouvernement s’est engagé à ramener le déficit public à 5,7 points de produit intérieur brut (PIB) en 2011 et à atteindre 4,5 % du PIB en 2012, 3 % en 2013 (limite fixée par le critère de Maastricht), 2 % en 2014 et 1 % en 2015.

Ceci étant posé, on notera que la stratégie pluriannuelle de réduction du déficit est sensé être compatible avec la croissance mais elle a été régulièrement surestimé sur ces dernières LFI. Les hypothèses de recettes sont par ailleurs sujettes à caution, assises en partie sur des « recettes de poche » (taxe sur les sodas?) et, signe de son déficit abyssal, la structure des dépenses de l’Etat est composée à 97% de fonctionnement.

QUELLES CONSEQUENCES POUR LES COLLECTIVITES ?

Cette stratégie s’appuie également sur un effort de réduction des dépenses dont la stabilisation des concours aux collectivités participe à maintenir cette part (20%) dans les dépenses de l’Etat. Ce dernier a donc tendance depuis une quinzaine d’années à retrouver des marges de man?uvre en décentralisant ses déficits vers les territoires tout en les rendant coupables de la hausse des dépenses publiques. Si celles ci ont effectivement été tirées par l’achèvement de l’intercommunalité ([Lire le rapport ci contre)], porteuse de peu d’économies d’échelle, elles ont toujours privilégié l’investissement public au point d’en porter depuis longtemps les trois quarts.

Contraintes dans leurs dépenses par la crise et les transferts de compétences successifs, les communes, départements et régions voient leurs recettes stagner du fait d’un serrage de boulon des subventions de l’Etat. Ces dotations sont elles-mêmes comprimées par sa situation budgétaire catastrophique.

Dès lors, comment les collectivités peuvent-elles faire face à leurs responsabilités?

« En les comprimant » mais en soulignant cela, la majorité des commentateurs omet que les trois quarts des investissements publics sont réalisés par les localités. Les perspectives 2012 des collectivités, et notamment les plus en difficulté d’entre elles, restent suspendues à un renforcement de la péréquation des ressources. Autrement dit, à une nouvelle répartition de la pénurie, entraînant de nouveaux arbitrages lors de l’élaboration du budget. Or, ces concours ne seront connus qu’en avril 2012.

Rien de bien engageant pour exécuter son budget d’autant qu’à cette crise des ressources nationales s’ajoute une possible crise de liquidité des ressources bancaires : un tiers des besoins d’emprunts des collectivités pourraient ne pas être satisfaits en 2012 faute de prêteurs disponibles.


Cosmos 1999 L’explosion par Antodisc