Tous héritiers ?

Au delà de l’opportunité évidente de maitrise de l’agenda politique, la question du Revenu Universel a eu un intérêt majeur. Celui de mettre sur la place publique la question des moyens de l’existence pour chacun. Indépendamment de son statut dans la société, comment assurer à chaque personne de nouvelles protections de nature à faire diminuer le niveau d’angoisse général ? Ce débat a pu donner le sentiment d’être abordé sous la seule contrainte budgétaire. En négligeant l’hypothèse de la raréfaction du travail ou de sa transformation. Les sommes colossales en jeu signent en effet une ambition au delà d’une mandature. Elles trahissent en même temps la difficulté du candidat désigné par le PS d’inscrire son action sur les prochains mois. Sauf à lever par de nouvelles taxes (sur les robots ou le foncier des entreprises) l’équivalent du produit de l’impôt sur le revenu. Et ce, pour financer la seule « version plancher » d’un Revenu Universel. Celle ci, « uniquement » élargie aux moins de 25 ans, représente déjà 3 points de prélèvements obligatoires supplémentaires. De fait, cette pression fiscale supplémentaire serait concentrée sur les classes moyennes, supérieures et les entreprises. Sauf à replier des dispositifs existants, mouvement sur lequel Benoit Hamon est resté assez flou jusqu’à maintenant, personne ne peut prédire les conséquences de tels ajustements dans une économie ouverte où le capital et les facteurs de production sont mobiles.

Au final, le candidat socialiste prend le risque d’un bouleversement fiscal majeur et immédiat pour palier à l’évaporation hypothétique du travail sur une génération. Souci louable de précaution, diront ses partisans. Connexion avec les thèses libérales diront ses contradicteurs.

 Ce débat sur l’universalité de dispositifs a d’ailleurs eu lieu. A l’étranger.

Notamment en Grande Bretagne en 2005, dans le sillage du « Child Trust Fund » et la perspective de la constitution d’un patrimoine de départ dans la vie. Dans ce dispositif, des sommes sont créditées sur le compte des jeunes selon la situation sociale de leurs parents, de manière à constituer un capital disponible à leur majorité pour des études supérieures par exemple. Les tenants de l’universalité se sont également opposés aux partisans du « ciblage ». Quelles tranches de revenus sont renforcées et quelle utilisation sont faites des sommes ainsi constituées ? Les partisans du ciblage l’ont emporté pour des raisons de coûts. L’opposition au sein des travaillistes a trouvé également un écho au sein des conservateurs, porteurs de la notion de « stakeholders ». Une vision de la société faite de membres « responsables » de l’utilisation des fonds qui leur sont destinés « au départ ».

Une opposition dans laquelle les tenant d’une troisième voie se sont peu exprimés, y compris en France ces dernières semaines. Ceux qui considèrent que ces arbitrages peuvent également appauvrir les ressources potentiellement affectables à l’investissement direct dans le service public de l’enseignement notamment. La difficile construction d’un horizon et de biens communs a un chemin bien difficile à éclaircir ces derniers temps.